Le campement d'al-Hussein fut dans un état de dévastation et de désolation
terrible. Il offrait aux pilleurs et aux assassins un spectacle macabre. Partout
des tentes brûlées et fumantes, des cadavres mutilés et démembrés, des femmes et
des enfants assoiffés, effrayés et hébétés, des cris et des gémissements.
Le corps décapité du petit-fils du
Prophète gisait déchiqueté, dénudé, recouvert seulement de la poussière soulevée
par la bataille, et du sang qui formait autour de lui une petite mare. Le nombre
de martyrs du camp d'al-Hussein s'élevait à soixante-dix-sept: soixante
compagnons et dix-sept frères, cousins et neveux de l'Imam.
Parmi les survivants du camp il n'y avait que les femmes et les enfants, et 'Ali
al-Sajjâd, fils d'al-Hussein que la maladie avait empêché de quitter son lit.
Mais pour le commandement des assaillants, ce spectacle lugubre ne semblait pas
suffisamment macabre pour produire l'effet voulu chez les spectateurs à qui il
tenait à présenter une scène inoubliable qui leur servirait de leçon.
En effet, en osant s'attaquer si ouvertement et si sauvagement au petit-fils du Prophète et à ses compagnons pieux, les Omayyades voulaient effrayer et terroriser toute la communauté musulmane et mâter chez elle toute velléité de contester un régime illégitime et usurpateur. L'ordre fut donc donné pour que les chevaux chargent de nouveau et piétinent les cadavres des martyrs et écrasent de leurs sabots les parties encore indemnes de leurs corps mutilés.
On s'acharna particulièrement sur
le corps d'al-Hussein, puisque 'Omar Ibn Sa'ad ordonna à dix de ses cavaliers de
passer sur son cadavre.
Après s'être livrée à cette furie sadique et à un pillage mesquin où même les
boucles d'oreilles furent arrachées des oreilles des orphelins en pleur, l'armée
de mercenaires procéda à la décapitation des martyrs pour que chaque groupe
participant à cette tuerie horrible, se charge de porter sur ses lances un
certain nombre de têtes qu'il devrait remettre entre les mains de 'Obeidullah
Ibn Ziyâd le gouverneur représentant de Yazid Ibn Mu'âwiyah - en guise
d'allégeance et comme témoignage d'obéissance et de soumission. Ainsi le cortège
de têtes se mit en route, laissant derrière lui les cadavres décapités des
martyrs.
En tète du cortège Khawla Ibn Yazid al-Asbahi et Hamid Ibn Muslim al-Azdi
portaient sur une longue lance la tête d'al-Hussein. Venaient ensuite les
Kindah, le groupe de Qaïs Ibn al-Ach'ath avec 13 têtes; puis les Huwâzen, le
groupe de Chemr Ibn Dil Jawchan, avec 12 têtes; puis les Temim, avec 17 têtes;
puis les Bani Assad avec 16 têtes; les Med-haj avec 7 têtes, les autres avec 13
têtes.
L'armée omayyade quitta donc le champ de bataille et se dirigea vers Kûfa, avec
pour principal butin de guerre les têtes des martyrs, ainsi que leurs veuves et
orphelins qu'elle prit comme captifs.
Quant aux cadavres, ils restèrent sur place à la merci du soleil brûlant de
l'été, durant trois jours. Après quoi, les Bani Assad qui habitaient
al-Ghadhiriyya, à proximité du théâtre des événements, vinrent aux nouvelles.
Voyant ce spectacle macabre, ils prièrent sur les martyrs. Ils enterrèrent al-Hussein là où se trouve actuellement son sépulcre, et son fils à ses pieds. Un peu plus loin de là, ils mirent en terre les autres martyrs tous ensemble.
Quant à al-'Abbas Ibn 'Ali, le frère d'al-Hussein, ils l'enterrèrent là où il fut tué sur la route d'al-Ghadhiriya, un peu plus loin des autres, à l'endroit où se dresse encore le dôme de sa tombe.
*source : bostani.com