Habib fils de Mazahir était attaché à l'Imam al-Hussein depuis sa plus tendre
enfance. Un jour, à Médine, quand Habib avait peut-être huit ans, le Saint
Prophète était passé près d'un groupe d'enfants en train de jouer. Habib était
du nombre. Le Prophète l'avait attrapé, soulevé dans ses bras, et embrassé avec
tant d'amour que les Compagnons présents s'en étaient étonnés. Certes chacun
connaissait l'affection que l'Envoyé de Dieu portait aux enfants. Mais pourquoi
de telles démonstrations envers cet, enfant anonyme en particulier. Alors le
Saint Prophète, les, yeux noyés de larmes, avait déclaré :
- J'ai vu de mes yeux Habib suivre avec dévotion al-Hussein où qu'il aille. Je
l'ai vu embrasser le sol foulé par al-Hussein. Et je vois un jour où même cet enfant
montrera son amour pour al-Hussein d'une manière qui rendra son nom immortel !
Quand il était arrivé à Karbala,la première chose qu'avait faite l'Imam
al-Hussein avait été d'écrire à Habib, qui se trouvait à Koufa, pour l'informer
de la situation dans laquelle il se trouvait.
A peine avait-il reçu la lettre de l'Imam al-Hussein que Habib avait décidé de
voler à son secours. IL informa son épouse de sa décision, lui offrant de lui
rendre sa liberté, si elle le souhaitait, et de lui donner tous les biens qu'il
possédait.
La noble dame lui répondit :
- Je suis fière de la décision que tu as prise de sacrifier ta vie pour défendre
l'Imam al-Hussein. Tu étais heureux que le petit-fils du Prophète te considère
comme son ami d'enfance, et il a bien montré combien il a confiance en toi,
puisque, à toi seul il a écrit pour demander du secours à l'heure du besoin ! Va
donc, et que Dieu te garde !
Habib n'avait plus qu'une pensée atteindre Karbala aussi vite que possible,
arriver à temps pour défendre son Imam. Il mit dans la confidence son esclave, à
qui il confia le soin de conduire son cheval en un certain endroit, d'où il
partirait pour Karbala la nuit même. Quand il arriva près de l'endroit du
rendez-vous, il entendit son esclave s'impatienter :
- Comment se fait-il que mon maître tarde tant ?
A-t-il été arrêté. Si c'est le cas, je vais moi-même partir retrouver l'Imam
al-Hussein pour l'assurer que mon maître ne l'a pas abandonné, mais qu'il a été
empêché de venir. Ce serait la réussite de ma vie si je pouvais combattre alors,
et verser mon sang pour le petit-fils de l'Envoyé de Dieu !
Habib appela les Bénédictions de Dieu sur son esclave, et il l'affranchit
sur-le-champ. IL atteignit le campement de l'Imam al-Hussein dans la nuit du 9
au10 Moharram. L'Imam avait distribué les armes à ses compagnons, et avait gardé
un équipement complet en réserve. Quelqu'un lui demanda pour quelle raison il ne
distribuait pas ces armes aussi.
L'Imam al-Hussein répondit : " Habib, le plus
cher de tous mes amis, va venir : je l'ai appelé ! Ces armes seront les siennes
"
Habib se battit comme seuls se battent ceux que la Foi anime. Et quand il reçut
le Martyre, il expira le cœur satisfait de n'avoir pas déçu celui qu'il aimait
tant.