Le secrétaire général du Hezbollah Sayed Hassan Nasrallah a fustigé le rôle de
l’Arabie saoudite dans la crise syrienne qui est selon lui le seul pays qui
œuvre pour torpiller le règlement politique basé sur la conférence de Genève.
Lors d’un discours prononcé via écran à l’hôpital ar-Rassoul al-Akram, pour
fêter ses 25 ans d’expérience, il a appelé cette monarchie à se fier à
l’évidence de la réalité, en optant pour le règlement politique, pour faire
éviter à la Syrie et à tous les pays de la région davantage de souffrances et de
destructions. Selon lui, même la cause palestinienne est lésée par cette
position saoudienne.
S’adressant aux forces du 14-mars, son éminence les a appelées à se consacrer
pour le règlement des dossiers libanais épineux, dont certains ne peuvent plus
attendre, et cet indépendamment des évolutions de la crise syrienne. Il leur a
conseillé d’accepter la formule de répartition des sièges ministériels 9-9-6
pour la formation du procahin gouvernement avant que les changements en cours ne
fassent changer au Hezbollah sa position.
Les idées principales du discours
Je vais commencer par l’affaire de la libération des Libanais enlevés à Azzaz :
je félicite leur liberté et leur retour à la patrie et à leurs familles, et
félicite la patience de leurs familles... et l’accueil qui leur a été réservé .
Mais c’est aussi l’occasion d’ouvrir tous les autres dossiers de ce genre et qui
sont toujours source de préoccupation chez les Libanais...
Nous souhaitons de même pour la libération des deux évêques syriens enlevés en
Syrie ...
Nous compatissons avec tous les citoyens libanais qui ont été enlevés
dernièrement, à commencer par Hassan Mokdad sans oublier le photographe Samir
Kassab et dont le dossier devrait être repris par les autorités libanaises.
Nous savons tous quelle est la partie responsable et chacun pouvant aider
quelque part devait suivre le dossier... De même, tous les anciens dossiers
devraient être recouverts : on constate que depuis le retour des kidnappés
d’Azzaz, certaines familles d’enlevés libanais ou de prisonniers en Syrie se
sont sentis un peu vexés, ce qui est normal...
La leçon d’Azzaz et celle de la résistance
Au lieu de se livrer à des surenchères dans ce genre d’affaires, qui ne servent
à rien, il serait utile de charger une partie officielle d’un tel dossier, comme
ceci s’est passé depuis quelques années entre la Syrie et le Liban, et nous
avions alors fait partie de ceux qui ont offert leur aide...
Si nous sommes un pays qui se respecte, ces dossiers devraient être rouverts,
hormis les considérations et les sensibilités politiques, en toute
responsabilité. L’une des leçons de l’affaire des Libanais enlevés à Azzaz,
c’est que nous sommes un État qui assume la responsabilité de ses citoyens : les
11 libanais kidnappés n’ont pas été abandonnés à leur sort, entre les mains de
leurs ravisseurs.
Quoique nous sommes un pays du Tiers monde mais nous ne laissons jamais nos
citoyens souffrir, ou abandonnés à leur sort.
Comme cela a aussi été le cas avec les rescapés et les victimes du bateau qui a
fait naufrage sur les côtes indonésiennes et qui ont tous été restitués au
Liban... c’est la preuve que notre Etat assume la responsabilité de ses citoyens
où qu’ils soient.
C’est l’école de la résistance qui refuse de laisser ses détenus ou les cadavres
ou les dépouilles de ses martyrs et tués chez les ennemis... C’est ainsi que
nous acquérons la réputation d’un pays qui se respecte...
Les autres dossiers
Or, certains dossiers similaires sont laissés pour compte aussi bien ceux aux
mains de l’ennemi israélien, qu’avec les Libanais qu’avec le frère syrien.
Dans le premier, il y a le détenu Yahia Skaf, enlevé par les israéliens et dont
le sort n’a pas encore été élucidé...
Des milliers de libanais ont disparu depuis l’invasion 1982, qui en est
responsable ? Les milices libanaises, les militaires israéliens? Selon le droit
international, c’est l’État de l’occupation qui en est responsable. Mais ce
dossier est endormi, et personne ne l’évoque...
Nous avons aussi plus de 17.000 personnes, dont les 4 diplomates iraniens qui
ont disparu sur le sol libanais. Qui donc suit ces dossiers ??... Pour ceux qui
ont disparu au Liban aussi faut-il un règlement définitif. Une décision avait
été prise par le gouvernement de Sélim el-Hoss, et les familles n’ont pas baissé
les bras... mais depuis, l’affaire a été abandonnée.
Ces dossiers devraient être suivis par des parties officielles. Sur le côté
syrien, une occasion a été perdue dans les années précédentes et l’occasion
s’était présentée avec la direction et j’ai entendu en personne des responsables
syriens qui ont affirmé être totalement disposés à en finir avec ce dossier...
Et l'affaire de Sayed Sadr
Il reste toutefois un dossier hautement sensible et dangereux qui affecte les
émotions de nombreux libanais, celui de notre imam sayed Moussa Sadr et de ses
deux compagnons... Cette affaire ne concerne pas seulement une famille ou une
communauté mais l’honneur d’un pays, c’est une affaire nationale par
excellence...
Il n’est pas permis de laisser cette affaire au chef du parlement ou au ministre
des AE, pour des raisons confessionnelles, laissant entendre que ce sont les
chiites qui devraient s’en charger seulement. C’est une affaire nationale qui
concerne l’ensemble des Libanais. Nous avons envoyé des messages à la direction
iranienne pour lui demander d’interférer dans cette affaire mais c’est l’État
libanais qui devrait s’en charger...
Parlons concrètement, dans les faits nous avons deux ex-responsables libyens qui
étaient proches de Kadhafi censés être liés à cette affaire : l’un d’entre eux
est en prison, il s’agit de Mohammad Sannoussi tandis que l’autre se promène
entre les capitales des pays du Golfe, Moussa Koussa : tous deux étaient dans
les services de renseignements de Kadhafi et tous deux pourraient donner des
informations sur le sort de l’imam Sadr.
Celui qui
se trouve emprisonné devrait faire l’objet d’un interrogatoire mais les
autorités libyennes actuelles font tout pour l’empêcher et celui qui ne se
trouve pas en prison aussi devrait être de même...
Ces dossiers sont souvent oubliés... Pourtant ils sont humanitaires par
excellence, et jouissent d’une dimension nationale et morale et c’est l’État
libanais qui devrait en assumer la responsabilité...
Les zones d’ombres de l’affaire d’Azzaz
Sur l’affaire d’Azzaz, rappelons que lors de la première tentative de leur
libération, lorsque nous avons dépêché les avions et avons prononcé des
discours, sans qu’ils ne soient libérés, et où nous avons franchement été
choqués. L’identité des ravisseurs est inconnue, s’agit-il des jihadistes, ou de
simples pilleurs, des indépendants ou des groupes au service de parties
régionales. Il est nécessaire de révéler leur identité, c’est le simple droit
des victimes...
Il est vrai que nous étions très méticuleux dans cette affaire parce que nous
craignions pour la vie des enlevés. Mais pour l’heure qu’ils sont libres,
l’affaire n’est pas encore finie : qui les a enlevés, quels sont les buts de
leur enlèvement, il reste des zones d’ombre que les gens devraient savoir. Les
raisons affichées ne sont pas les véridiques...
Nous
avons depuis plus d’un an apporté l’engagement syrien de libérer les
prisonnières syriennes dans les geôles des autorités. Qui a entravé leur
première libération et permis que leur incarcération perdure plus d’un an et
demi.
Des droits devraient être rendus et des masques devraient tomber
Les évolutions syriennes
En politique, j’ai deux mots à dire :
À commencer par la Syrie, car ce qui s’y passe exerce une grande influence sur
le Liban dans tous les domaines à peu près : sécuritaire, politique, économique,
social, ...
Une équipe politique au Liban a décidé de lier tout dans notre pays avec ce qui
se passe en Syrie et depuis elle torpille sa vie politique dans l’attente de ce
qui va se passer, dans l’espoir que le régime syrien va être renversé. Certains
rêvaient d’ores et déjà de rentrer au Liban en passant par l’aéroport de Damas,
espérant que la Syrie allait changer de cap. Et prévoyant le renforcement de
leurs cartes de cette équipe éliminatrice des autres sur la scène libanaise...
Je ne veux pas entrer dans cette interminable controverse d’accusations et de
contraccusations que nous nous livrons au Liban. Les Libanais devraient savoir
tous seul qui au Liban torpille la vie politique, qui entrave la formation du
gouvernement, qui empoisonne l’exercice parlementaire, qui empêche le cabinet
actuel de prendre des décisions qui ne devraient être ajournées...
Concernant la Syrie, des évolutions importantes aussi bien localement que dans
la région et dans le monde ont eu lieu...
Sur le terrain, les évolutions inscrivent une avancée de l’Armée arabe syrienne
et des forces populaires qui la soutiennent. Elles rendent compte de
l’impuissance des groupes armés à changer la donne et sont favorables pour le
régime, y compris les conflits intestinaux qui ont éclaté entre les milices
elles-mêmes et toutes les répercussions qui en découlent et le changement
d’humeur de l’intérieur syrienne, dans le monde arabe et dans l’opinion
internationale.
Ces évolutions excluent toute attaque militaire contre la Syrie. Elles rendent
compte de l’incapacité de l’opposition à s’unir, et du démantèlement du front de
soutien qui lui était acquis, du fait de sa préoccupation dans ses défis
internes...
L’Arabie en colère
Mais certains n’en font qu’à leur tête... Alors que le monde entier est persuadé
qu’il n’y aura pas de solution militaire et que la solution politique est la
seule possible, via le dialogue sans conditions préalables, (car le fait d’en
imposer torpille le règlement) ...
Alors que tout ce qui est dit sur Genève 2 ouvre de nouveaux horizons, alors que
tous les peuples de la région particulièrement lésés par la crise syrienne
poussent vers l’adoption du règlement politique,..., un seul État de la région
est très en colère !!
Je ne veux pas soulever une controverse sur cet État mais tout le monde sait
déjà qu’il s’agit de l’Arabie saoudite qui affiche une grande irritation.
Le fait d’avoir envoyé des dizaines de milliers de combattants de tous les coins
du monde...., d’avoir dépêché des armes de tous les calibres, d’avoir fourni un
financement à hauteur de 30 milliards de dollars, sans oublier les campagnes
politiques et médiatiques et les sanctions économiques et autres n’aura donc
servi à rien !
Tout a été utilisé et fourni à ces protagonistes locaux, régionaux et
internationaux qui voulaient renverser le régime, mais en vain. Désormais, il
faut œuvrer en fonction de qui est possible...
La région ne peut rester embrasée parce qu’un Etat est en colère et tente de
torpiller la conférence
Ce que vous entendez en Syrie sur les changements de cap au sein des milices ne
sont que l’illustration de ces tentatives d’avorter la solution politique qui ne
veut dire que davantage de destructions et de graves séquelles dst s les
domaines sur tous les pays de la région et surtout pour la cause palestinienne.
Cet entêtement est sans horizon.
Avant qu’il ne soit trop tard
Le dialogue est une occasion pour tous. Il faut la saisir avant qu’il ne soit
trop tard. Je vous conseille de ne pas la rater. Car ce qui adviendra dans
l’avenir n’est pas dans votre intérêt, je vous conseille d’aller vers le
dialogue politique sur la Syrie avant qu’il ne soit trop tard !
Pour tous ceux qui souffrent pour tous les malheurs endurés en Syrie, ils
devraient pointer leurs doigts accusateurs à tous ceux qui entravent le
règlement politique. Ils sont connus et ils affichent leur position ouvertement
! Il en incombe à la nation entière de les empêcher !
L’organisation de la conférence des États islamiques, la Ligue arabe,... tous en
appellent à une solution politique...
Vous avez utilisé tous les moyens plausibles entre vos mains et vous avez
échoué.
Il vous faut désormais être réaliste et non s’entêter, pour soigner les
blessures de la Syrie et l’édifier de nouveau
Sauf si vous et certaines parties locales, dont le courant du Futur avez une
lecture différente de la conjoncture internationale et régionale !
S’agissant de la situation libanaise, je conseille à ces parties locales de
mettre le sujet de la Syrie de côté. Davantage d’attentisme ne va qu’améliorer
les conditions de vos adversaires.
Saisir la formule 9-9-6
Jusqu’à présent nous acceptons la formule du gouvernement à former basée sur une
répartition 9-9-6 mais si les conditions changent, il se peut que nous la
rejetions. Je ne menace personne, mais je fais des conseils !
Celui qui voudrait revenir via l’aéroport de Damas ( en allusion au chef du
Futur Saad Hariri), ou il reste là où il est, ( à Paris ou à Riad) ou son seul
accès est l’aéroport du martyr Rafic Hariri qui est le seul à l’accueillir !
Il y a 2 ans, dans un discours j’ai prononcé, j’avais signalé que le camp de
14-Mars avait misé sur 5 ou 6 thèmes, très sensibles dans l’histoire du Liban,
et qu’il a échoué. Je vous avais dit que vous misez sur un changement syrien et
que vous allez perdre une nouvelle fois !
Je vous demande de retourner aux dossiers libanais internes : celui du pétrole,
de la loi électorale, les élections législatives ou présidentielles,..., et tous
les autres dossiers suspendus
Je ne veux accuser personne mais voudrais approcher le sujet d’un nouvel angle.
Le Liban fait face à une paralysie générale avérée et tout le monde le sent.
Selon le 14-mars le règlement passe avant tout par la formation d’un
gouvernement, et ce avant même de participer à la table de dialogue, ou avant
d’aller au parlement...
Notre équipe a accepté la répartition des cabinets 9-9-6 mais vous le refusez,
parce que vous dites ne voulez pas nous donner le pouvoir torpiller certaines
décisions prises au gouvernement...
Or, la formation d’un gouvernement permet de relancer la vie politique, de
relancer les prises de décision dans le parlement et dans le gouvernement.
Toutes les décisions peuvent être prises à la majorité des deux tiers, sauf
celles qui nécessitent plus que les deux tiers...
Deux possibilités devant les Libanais
Je m’adresse au libanais : deux éventualités se présentent : la poursuite de la
paralysie de la vie à l’état actuel, et qui rien ne peut changer et ne fait que
perdre l’état ses atouts...
La deuxième, par le fait que vous soyez plus modeste. Nous l’avons été en
admettant les 9 sièges qui ne reflètent pas notre réelle proportion. Acceptez,
vous aussi. Ainsi, la vie reprendra dans les trois quart des décisions du pays,
et il se peut que le quart de ces décisions fassent l’objet de désaccords...
Que dicte la raison dans une situation pareille, quel choix faut-il faire face à
ces deux éventualités, ou se situent l’intérêt des libanais et leur avenir...
Supposant que vous êtes les gens honorables comme vous prétendez l’être, ceci ne
mériterait-il pas de votre part que vous donniez leur droit de représentation à
ceux qui le méritent??
Si vous insistez dans votre refus, dans le cas du strict minimum, je vous
imputerai la responsabilité qui en découle...
Est-il permis que pour des considération non constitutionnelles que vous
paralysiez le vote au Parlement, que vous entraviez des décisions
gouvernementales sur des questions qui ne supportent pas d’ajournement, dont
entre autre le dossier du pétrole et surtout celui de la sécurité à Tripoli en
particulier.
Toutes
les forces politiques présentes dans le gouvernement sont disposées à le faire,
si ce n’est les pressions énormes exercées sur le Premier ministre Najib Mikati
en particulier (je ne sais pas ce ce qu’il en est du président de la république)
de la part de parties qui ne cessent de l’humilier quotidiennement et sans
oublier aussi la pression saoudienne et su sur fond de haines communautaires et
confessionnelles attisées...
Le pétrole et la sécurité
D’autant plus que deux dossiers essentiels ne supportent aucun report : celui du
pétrole qui fait l’objet d’un pillage et devrait être réglé le plus tôt
possible, sinon c’est une grosse perte pour les droits des libanais.
Et il y a
aussi la question sécuritaire dont celle de Tripoli où ce qui se passe est
affligeant, et dont la seule solution est une décision du gouvernement libanais
soutenue par une feu vert des différentes forces locales permettant à l’armée
libanaise de prendre en charge la mission de la sécurité de la ville entière et
de ses banlieues et de lui prêter main forte pour être présente partout...
C’est la seule solution, via l’armée, et non via l’Etat islamique en Irak et au
Levant (EIIL) ou du front al-Nosra, qui ne fait que compliquer davantage la
situation. Où donc l’EIIL a-t-il apporté la paix et la sécurité ?? Et quel
exemple a-t-il donné ?
Cette décision devrait être escortée par des positions politiques et religieuses
qui la soutiennent et non qui l’entravent et l’encombrent...
Le dossier sécuritaire au Liban est très dangereux. L’État libanais connait très
bien sur les différents réseaux terroristes et où se trouvent les voitures
piégées dans telle ou telle localité. Mais il ne peut broncher... Sans
couverture politique, il ne peut intervenir car il y va de la vie des
libanais...
En cette occasion ou nous célébrons le développement d’une institution qui a
pour souci de donner la vie aux gens, de les soigner, nous disons que notre
espoir est d’édifier des institutions humanitaires pour toute la nation, pour la
débarrasser de tous les dangers
Pas seulement la présence des chrétiens est menacée, et il est de leur droit de
pousser un cri d’alarme et d’organiser des conférences. Mais en réalité, ce sont
les adeptes de toutes les religions qui sont menacés. Aussi bien les musulmans
que les chrétiens, aussi bien les chiites que les sunnites...
La région sombre vers la haine et le mépris. Il faut agir dans cette étape
difficile pour éviter qu’elle ne finisse dans l’urgence.
*source : www.almanar.com.lb / 28-10-2013