1er Conte
Cheikh Thiqat al-Islâm al-Nûrî rapporte dans son Dâr al-Salâm le témoignage suivant du savant Amîr Sayyid Ali fils d'Amir Sayyid Hassan al-Içfahânî: «Lorsque mon père est mort à Isfahân (en Iran), j'étais dans la ville sainte de Najaf (Irak) où j'effectuais mes études théologiques. Ce sont mes frères qui se sont occupés de ses affaires et je ne fus pas mis au courant des détails de ce qui s'était passé. Sept mois plus tard ma mère est décédée et on transporta sa dépouille mortelle à Najaf pour y être inhumée. Un jour j'ai vu en rêve mon père entrer soudainement dans la chambre où j'étais assis chez moi. Je me suis alors relevé par respect pour le saluer. Il s'est assis et a eu l'amabilité de s'enquérir de moi. Je me suis rappelé à ce moment-là qu'il était déjà mort Aussi lui ai-je demandé: «Comment se fait-il que je te vois maintenant à Najaf alors que tu es mort à Isfahân?». «Oui certes je suis mort à Isfahân, mais après ma mort, on m'a transféré ici, à Najaf où je séjourne actuellement». Je lui ai demandé si ma mère était avec lui et il a répondu par la négative, ce qui n'a pas manqué de m'inquiéter et de m'affliger. Mais très vite je me suis rappelé que mon père était un uléma et que la position (la place) réservée aux ulémas diffère de celle des autres. Puis, je l'ai questionné sur sa condition et son état, il m'a dit: «Avant, j'étais en difficulté et je subissais beaucoup d'épreuves, mais maintenant je suis dans l'aisance, depuis que les difficultés se sont dissipées». Etonné, je lui ai dit: «Tu étais dans les difficultés?» «Oui, parce que j'avais une dette non réglée envers Hâjj Reda al-Na'al, ce qui m'a mis dans l'embarras et les difficultés», m'a-t-il répondu. Sur ce, je me suis réveillé terrifié et troublé. Sans tarder, j'ai écrit à mon frère en Iran pour lui raconter mon rêve et je lui ai demandé si mon père devait quelque chose à Hâjj Reda al-Na'al. Mon frère m'a répondu: «J'ai examiné minutieusement la liste des créanciers de mon père, mais le nom de Hâjj Reda al-Na'al n'y figure pas». Je lui a écrit une autre lettre pour lui demander d'aller voir cet homme personnellement afin de savoir si mon père lui devait effectivement quelque chose. Mon frère s'est exécuté et m'a écrit que l'homme en question lui a expliqué cette affaire comme ceci: «Après la mort de votre père je vous ai demandé si mon nom figurait sur la liste des créanciers de votre père, et vous m'avez affirmé que non. J'ai pensé alors que je ne pouvais pas démontrer matériellement l'existence de ma créance de 18 tumâns, car j'ai compté sur le registre de votre père pour qu'il l'y enregistre lui-même comme il en avait l'habitude. Mais apparemment il avait oublié ou négligé de le faire. J'ai pensé qu'il était donc inutile de vous les réclamer». Et mon frère d'ajouter dans sa lettre: «J'ai parlé à Hâjj Reda al-Na'al alors de ton rêve et je lui ai offert la somme en cause, mais il a refusé de la recevoir en me disant: «Maintenant que vous m'avez parlé de cette créance je vous en acquitte».
Moralité, une dette non payée est une cause de supplices» dans la tombe pour celui qui la néglige. Les héritiers, la famille ou les amis du mort endetté devraient régler cette dette à sa place ou à défaut, demander aux créanciers d'acquitter par un geste de bienfaisance le défunt.
2ème Conte
Il est rapporté toujours dans Dar al-Salam qu'al-Hajj Mirza Khalil al-Tihrani a relaté le témoignage suivant:
«Alors que j'étais à Karbala (la ville du Mausolée de l'Imam al-Hussayn (Que la Paix soit sur lui) Irak) et ma mère à Téhéran (Iran), j'ai vu un jour en rêve ma mère venir vers moi et se plaindre: «O mon fils. Me voilà. On m'a transporté auprès de toi et on m'a brisé le nez». Je me suis alors réveillé en état de choc. Quelque temps après, j'ai reçu une lettre de mes frères (en Iran) m'informant que ma mère était morte et qu'ils m'avaient envoyé sa dépouille mortelle. Peu après les croque-morts sont arrivés chez moi et m'ont informé qu'ils venaient de déposer sa dépouille mortelle à Khan Kifil (village plus proche de Najaf que Karbala) croyant que j'étais à Najaf et non à Karbalaa. Là, j'ai compris que mon rêve était prémonitoire et que ce que ma mère m'avait dit dans mon rêve était une réalité. Toutefois je suis resté intrigué par ce qu'elle m'avait rapporté, à savoir qu'on lui avait brisé le nez. Aussi, pour résoudre cette énigme, ai-je enlevé la partie du linceul qui couvrait son visage dès qu'on m'a apporté le cercueil. J'ai vu effectivement que son nez était brisé. J'ai questionné les croque-morts sur ce qui s'était passé, ils m'ont dit qu'ils n'en savaient rien, tout en ajoutant: «Dans un des relais de notre route, nous avons déposé son cercueil sur les autres cercueils que nous transportions. Les ânes qui s'y trouvaient se sont mis à courir dans tous les sens et à un moment donné, ils ont bousculé le cercueil qui est tombée par terre. Peut-être cette chute a-t-elle causé cette brisure. On n'a pas d'autre explication». J'ai fait transporter le cercueil jusqu'au Mausolée d'al-Abbas (Que la Paix soit sur lui) où il fut déposé. Je me suis adressé à ce dernier: «O Abul-Fadhl al-Abbas, aa mère que voici ne savait pas accomplir ses prières et son jeûne correctement. Elle est maintenant ton hôte et sous ta protection. Eloigne d'elle donc les supplices et je m'engage pour ma part à louer le service d'un croyant qui accomplira en son nom et à sa place un jeûne de remplacement et des prières de remplacement pour une durée de 50 ans, afin qu'elle soit acquittée de ses obligations envers Allah. Après quoi, nous l'avons inhumée. Mais j'ai négligé mon engagement de payer les services d'un croyant pour l'accomplissement du jeûne et des prières de remplacement pour elle. Après un certain temps, j'ai fait le rêve suivant: J'ai entendu des cris et des bruits à ma porte. Je suis sorti de la maison pour m'enquérir de ce qui se passait. J'ai vu alors ma mère attachée au tronc d'un arbre, les coups de fouets s'abattant sur elle. J'ai demandé aux tortionnaires: «Qu'est-ce qui vous prend? Pourquoi la fouettez-vous?». Ils ont répondu: «Abul-Fadhl al-Abbas nous a ordonné de le faire, jusqu'à ce qu'elle paye une somme d'un tel montant ...». Je suis retourné à la maison et j'ai apporté la somme exigée. J'ai détaché ma mère et je l'ai amenée à la maison pour prendre soin d'elle. Lorsque je me suis réveillé, je me suis rendu compte que la somme d'argent demandée par les tortionnaires correspondait exactement au montant que j'aurais dû payer pour m'acquitter de mon engagement de garant de ma mère, c'est-à-dire louer le service d'un croyant qui se charge d'accomplir pour elle et à sa place le jeûne et les prières de 50 ans. Aussi ai-je apporté tout de suite cette somme et me suis-je rendu chez Sayyid Mirza Sayyid Ali (l'auteur d'Al-Riyadh) en lui disant: «Voici la rétribution de 50 ans de prière et de jeûne. Je te prie de les utiliser à cet effet en vue de l'acquittement de ma mère»1.
L'auteur de ce livre, Cheikh Thiqat al-Islâm al-Nuri fait remarquer que ce rêve prémonitoire doit nous inciter à ne jamais négliger nos engagements envers Allah et autrui, sous peine d'en subir les dramatiques conséquences, lorsqu'il serait trop tard.
3ème Conte
Il est rapporté dans Dar al-Salam ce témoignage d'al-Hajj Mulla Khalil al-Tihrani: «Un pauvre et simple serviteur, dénommé Ali Talib travaillait dans un hammam de Téhéran. Il n'accomplissait ni la prière ni le jeûne. Un jour, il est allé voir un architecte et lui a demandé de lui construire un hammam. Surpris, l'architecte lui a demandé: «Et où vas-tu trouver l'argent nécessaire pour la construction?» Le serviteur lui a répondu: «Cela ne vous regarde pas, ne posez pas de questions. Tenez Prenez l'argent et allez construire le hammam». L'architecte s'est mis au travail et finit la construction du hammam demandé, qu'il a baptisé du nom du serviteur «Ali Talib». Les années se sont écoulées. Et un jour alors que je m'étais installé à Najaf (Irak), j'ai vu en rêve Ali Talib dans le célèbre cimetière de Najaf Wadi al-Salam. Etonné, je l'ai questionné: «Comment te trouves-tu dans ce lieu sacré, alors que tu ne faisais ni la prière ni le jeûne?» Il m'a répondu: «Lorsque j'étais mort, on m'avait enchaîné et soumis aux supplices. Al-Hajj Mullâ Ali al-Kirmanchahî, qu'Allah le récompense de sa bienfaisance, m'a sauvé en déléguant quelqu'un pour faire le Pèlerinage de la Mecque en mon nom. Il a loué les services d'Untel pour qu'il accomplisse à ma place les prières et le jeûne que j'avais négligés de mon vivant. Il a payé pour moi la Zakat que je n'avais pas acquittée. Il a indemnisé Untel et Untel que j'avais lésés. Il n'a rien laissé de ce que j'avais sur la conscience sans l'avoir réglé. C'est ainsi que j'ai été délivré des supplices». Je me suis réveillé, très surpris de ce rêve qui restait gravé dans ma mémoire jusqu'au jour où j'ai vu des gens venus de mon quartier à Téhéran. Lorsque je leur ai demandé des nouvelles d'Ali Talib, ils m'ont raconté comment il était mort et comment Hajj Mullâ Muhammad al-Kirmânchâhi s'était occupé avec application de le laver à titre posthume de tous ses péchés, manquements et obligations. Les détails qu'ils m'ont donnés sur cette affaire étaient une copie conforme et exacte de ce que j'avais entendu dans le rêve»2.
Ce rêve prémonitoire confirme les récits hagiographiques qui nous indiquent que la prière et le jeûne, ainsi que tous les actes de piété et de bienfaisance faits à titre posthume au bénéfice d'un mort, lui sont bénéfiques et salvateurs. Si le mort se trouve en difficulté, ces actes sont de nature à le soustraire à ladite difficulté. De même ils confirment, d'autre part, les récits hagiographiques selon lesquels: «Il n'y a pas un croyant qui meure aux orients et aux occidents de la terre sans que son âme ne soit transportée à Wâdî al-Salâm»3.
4ème Conte
Le grand et célèbre Allâmah (érudit), al-Qadi Said al-Qummi rapporte que le Cheikh Baha al-Din al-Amili a rendu visite à un mystique qui avait élu comme refuge et siège un cimetière d'Isfahân (Iran). Ce dernier (le mystique) a raconté au Cheikh: «J'ai assisté dans ce cimetière à une scène étrange: un jour j'ai vu venir un groupe transportant une dépouille mortelle qu'il a inhumé dans une tombe, à tel endroit. Une heure après le départ de ce groupe j'ai senti s'exhaler en l'air un très bon parfum différent des parfums courants. J'ai été intrigué. J'ai regardé à gauche et à droite pour savoir quelle était la source de ce parfum. J'ai vu soudain un beau jeune homme, charmant et au visage agréable, ayant l'aspect des rois, se diriger vers la tombe en question et s'asseoir à côté d'elle, avant de disparaître subitement, comme s'il était entré dans la tombe. Quelques secondes après, j'ai senti se répandre en l'air une odeur on ne peut plus nauséabonde et répugnante. J'ai regardé autour de moi, et j'ai vu un chien suivre les traces du jeune homme jusqu'à ce qu'il soit arrivé à la même tombe pour disparaître. J'ai été encore plus perplexe face à ce qui se passait. Pendant que je pensais à cette scène étrange, le jeune homme a réapparu, sortant du même endroit où il avait disparu. Il se trouvait dans un mauvais état, saignant de différentes blessures. Alors qu'il retournait d'où il était venu, je l'ai suivi et l'ai prié de me dire ce qui se passait. Il m'a expliqué: «Je suis la bonne action de ce mort. J'avais reçu l'ordre de prendre soin de lui dans sa fosse, mais le chien que vous avez vu venir, et qui représente la mauvaise action du mort, s'est pointé. J'ai voulu l'écarter par fidélité au mort, mais il m'a mordu, m'a blessé et m'a arraché un morceau de chair, comme vous voyez. Il m'a empêché de tenir compagnie à son compagnon (le mort dont il incarnait la mauvaise action). Je n'ai pu donc rester en sa compagnie et je suis parti». Le mystique ayant terminé la relation de sa vision au Cheikh, celui-ci lui dit: «Tu as dit la vérité, car nous croyons à l'incarnation de nos actes, lesquels prennent des figures anthropomorphes, zoomorphes et autres selon les cas».
Al-Allamah al-Majlici qui rapporte dans ses Al-Bihar ce conte commente que celui-ci confirme le hadith qu'al-Sadûq relate au début de ses Amâlî et qui se résume ainsi: «Un jour, Qays ibn Açim al-Manqari, accompagné d'un groupe de délégués des Bani Timim vint voir le Prophète (Que la Bénédiction d'Allah soit sur lui et sur sa Sainte Famille). Ils lui demandèrent de leur faire un sermon utile et bénéfique. Le Prophète (Que la Bénédiction d'Allah soit sur lui et sur sa Sainte Famille) dit, entre-autres: «O Qays Il est inévitable que tu aies un compagnon vivant qui sera enterré avec toi, et que tu sois enterré avec lui lorsque tu mourras. Si ce compagnon était noble, il prendra soin de toi, et s'il était mesquin, il te négligera. Tu ne seras enterré qu'avec lui, ressuscité qu'avec lui, et interrogé qu'à son sujet. Alors fais en sorte qu'il ne puisse être que bon, car s'il était bon, tu auras une compagnie agréable et tu te réjouiras avec lui, mais s'il était pervers, tu ne pourras que te dépayser en sa compagnie. Ce compagnon est ton action (tes actes)...»4.
* Les Étapes de l'Au-delà (De la tombe à la Résurrection), Édité et adapté en français par: AL-BOSTANI, Abbas. Publication de la Cité du Savoir.C. P. 712, Succ. (B), Montréal, Québec, H3B 3K3, Canada.
1- Dâr al-Salâm, 2/ 245 - 246
2- Dâr al-Salâm, 2/ 244 - 245
3- Bihâr al-Anwâr, 6/ 268
4- Bihâr al-Anwâr, édition de Beyrouth, 74/ 111