La Dernière Maladie du
Prophète
La fièvre du Prophète revint à la charge dans la maison de Maymûnah, en
s'aggravant et avec des accès occasionnels d'évanouissement.
Toutes ses femmes et tous ses parents se rassemblèrent pour le voir. On lui
conseilla de ne plus se déranger pour rendre visite à tour de rôle à toutes ses
femmes, comme il le désirait, et de rester tranquille dans un même endroit
pendant sa maladie. La maison de aiicha fut proposée et admise à ce propos,
d'une façon unanime.
Le Prophète, la tête bandée et les
vêtements mis hâtivement autour de son corps, fut conduit à la demeure de
aiicha, soutenu par al-Fadhl, le fils d'al-Abbâs d'un côté, par Ali son cousin
et fils adoptif de l'autre. Selon le récit fait par aiicha, celle-ci affirme que
le Prophète était soutenu d'un côté par al-Fadhl, de l'autre par Ali (Psl).
Hâter l'Expédition vers la Syrie
Bien que la maladie du Prophète s'aggravât de jour en jour, elle ne le confina
toutefois pas totalement à la maison. Il maintint l'habitude d'aller chaque jour
à la Mosquée par la porte de son appartement donnant sur la cour, pour diriger
la prière. Une semaine après avoir appelé ses hommes à préparer l'expédition
vers la Syrie, il s'aperçut qu'ils ne s'empressaient pas d'aller au camp de
rassemblement à Jorf. Il était en colère d'entendre les gens dire : " Il choisit
un adolescent pour commander le chef des Muhâjirin".
Un jour, après la prière, il s'assit sur la chaire, la tête toujours bandée avec
une serviette, et s'adressa ainsi à l'assistance :
" Vous les hommes ! Qu'est-ce que cela veut dire ? On dit que certains
d'entre vous grognent contre le fait que j'aie nommé Osâmah pour le commandement
de l'expédition vers la Syrie. Si vous me reprochez maintenant cette nomination,
désormais vous me blâmerez aussi pour la nomination de son père, Zayd. Je
voudrais que vous le traitiez bien, car il est l'un des meilleurs d'entre vous.
Maudit soit celui qui s'abstient de rejoindre l'armée ". IL demanda ensuite
que l'expédition fasse mouvement le plus tôt possible, et quittant la chaire, il
rentra chez lui.
Avertissement aux Muhâjirîn et aux Ançâr
Un autre jour, toujours après la prière, il dit à l'assemblée : " Le Seigneur
a donné à Son serviteur le choix de continuer dans cette vie, alors qu'elle est
pour lui ténèbres. Quant à moi, j'ai choisi l'autre vie. Tous les autres
Prophètes moururent avant moi. Vous ne devriez pas vous attendre à ce que je
vive éternellement ". Après un moment de silence, il poursuivit : " Vous
1es Ançâr ! Traitez bien ceux à qui vous avez donné refuge. Et vous les
Muhdjirîn ! Les Ançàr me sont sûrement chers, car c'est parmi eux que j'ai
trouvé refuge. Honorez-les donc et traitez-les bien ".
Puis, il récita la Sourate Le
Temps : " Par le
temps ! Oui, l'homme est en perdition, sauf ceux qui croient; ceux qui
accomplissent des œuvres bonnes; ceux qui se recommandent mutuellement 1a
Vérité, ceux qui se recommandent mutuellement la patience", et le verset
24 de la Sourate Mohammad : "
Que peut-on attendre de vous, si vous déteniez
l'autorité, sinon semer la corruption sur la terre et rompre vos liens de
parenté". IL mit ainsi en garde ses Compagnons contre leurs
desseins malicieux.
La maladie du Prophète s'aggravait chaque jour un peu plus et il en était très
conscient. L'expédition de Syrie le préoccupait cependant sérieusement. Il
continua à dire à ceux qui l'entouraient : " Envoyez rapidement 1'armée
d'Osâmah ".
La Dernière Prière et le Dernier Sermon du Prophète dans sa Mosquée
Tôt le lundi matin (le jour de Sa mort), le Prophète, toujours la tête bandée,
sortit à la Mosquée, soutenu par deux hommes. Après les prières, il fit un court
sermon, d'une voix qu'on entendait au-delà des portes extérieures de la Mosquée,
laquelle était inhabituellement remplie par les gens anxieux qui étaient venus
s'enquérir de son état après la crise de la nuit précédente. Dans son sermon, le
Prophète dit que les esprits malfaisants étaient proches et que la plus noire
partie d'une nuit noire et tempétueuse s'approchait.
A la fin du sermon, Osâmah était
aussi présent, pour recevoir les bénédictions du Prophète qui lui dit : "
Dépêche-toi avec ton armée; que la bénédiction de Dieu soit avec toi ".
Osâmah retourna au camp et donna l'ordre du départ le même jour.
La Mort du Prophète
Le Prophète regagna sa maison et,
exténué, se jeta sur son lit. Ses forces le lâchèrent rapidement.
IL appela toutes ses femmes près de lui et leur donna les instructions
nécessaires en leur ordonnant de rester tranquilles dans leurs maisons et de ne
pas se montrer dans un état de l'Epoque de l'Ignorance (Sourate al-Ahzâb, verset
33). Fatima, sa fille bien-aimée pleurait. Il l'appela, la fit asseoir à côté de
lui et chuchota quelques mots dans son oreille. Elle fondit en larmes.
Le Prophète glissa encore quelques mots dans son oreille et essuya ses larmes
avec ses mains. Elle parut alors réconfortée et sourit.
Puis il appela al-Hassan et al-Hussein, ses deux fils chéris qu'il n'avait cessé
de caresser dans son giron depuis des années, voulant les embrasser pour la
dernière fois. Al-Hassan passa Son visage sur celui du Prophète et al-Hussein se
jeta sur sa poitrine. Chacun d'eux se mit à sangloter et à crier avec une telle
amertume que toute l'assistance vit leurs larmes perler dans leurs yeux.
Le Prophète les étreignit et les embrassa avec beaucoup d'affection et ordonna à
toutes les personnes présentes de les traiter, ainsi que leur mère avec grand
amour et respect, exactement comme il les traitait lui-même (le Prophète avait
l'habitude de se lever et de faire un ou deux pas en direction de Fatima chaque
fois qu'il la voyait venir vers lui. Il l'accueillait toujours avec une joie
manifeste. Puis baisant sa main, il la faisait asseoir à sa propre place).
Ensuite, il appela Ali qui prit place près du lit.
Le Prophète lui ordonna de rendre la somme qu'il avait empruntée à un certain
Juif pour couvrir les frais de l'expédition d'Osâmah, et lui enjoignit d'endurer
avec patience et résignation les troubles auxquels il serait confronté après sa
mort. IL lui demanda de rester patiemment sur son droit chemin menant à l'autre
monde, lorsqu'il constaterait que les gens se trouveraient sur celui menant vers
le monde d'ici-bas.
Le Prophète prit la tête d'Ali sous son manteau qui les couvrit tous deux, et ce
jusqu'à ce qu'Ali ait sorti sa tête pour annoncer la mort du Messager de Dieu.
Ibn Sa`d et al-Hâkim ont noté que le Prophète avait rendu le dernier soupir, sa
tête dans le giron d'Ali (Madârij al-Nubuwwah).
Les derniers mots prononcés par le Prophète, selon Ali furent : " La
compagnie bénie dans 1e Ciel. Les prières", après quoi il s'est étiré
doucement, et puis tout ont été finis.
Que la paix éternelle soit sur lui et sur les membres de sa famille qui se sont
sacrifiés pour la cause de l'Islam et qui nous ont dirigés sur le droit chemin.
Fatima, se frappant le visage et se lamentant d'amertume rejoignit les autres
femmes qui gémissaient bruyamment. C'était à peine midi passé, le le 28 Safar de
l'an onze (calculé en commençant par le mois de Mooharram), que le Prophète
rendit l'âme, à l'âge de soixante-trois ans.
Selon une tradition, avant la mort du Prophète, quelqu'un avait demandé la
permission de lui rendre visite, alors qu'il se trouvait dans un état
d'inconscience.
Fatima répondit au visiteur que le moment ne convenait pas à une telle
intrusion. Sans prêter attention à la réponse, le visiteur avait demandé encore
la permission de se rendre auprès du Prophète, et Fatima lui répondit de la même
façon. Il réitéra sa demande une troisième fois sur un ton si horrible que
Fatima en fut terrifiée. Jibrîl (l'ange Gabriel) qui était descendu en ce
moment-là pour visiter le Prophète dit à ce dernier : " ô Prophète ! C'est
l'ange de la Mort. IL te demande la permission d'entrer. Jamais auparavant, il
n'a demandé la permission à aucun homme, et jamais par la suite il ne fera
preuve d'une telle sollicitude envers aucun autre ".
Le Prophète demanda alors à Fatima
de le laisser entrer.
L'ange de la Mort entra et s'arrêtant devant le Prophète, dit : " ô Prophète
du Seigneur ! Dieu m'a envoyé à toi et m'a donné l'ordre d'agir selon ton désir.
Ordonne-moi d'arracher ton âme, je le ferai; ou bien ordonne-moi de la laisser,
et je t'obéirai ".
Alors, Jibrîl s'interposa : " ô Ahmad ! Le Seigneur te désire (auprès de LUI) ".
" Vas-y donc, dit le Prophète à l'ange de la Mort, et fais ton travail ".
Jibrîl fit ses adieux au Prophète dans ces termes : " Que la paix soit sur toi ô Prophète du Seigneur ! Ma descente sur terre se termine avec toi ".
Le Prophète en décida ainsi et un
gémissement de voix céleste s'éleva du convoi funèbre invisible.
La nouvelle de la mort du Prophète se répandit vite dans toute la ville de
Médine et les gens affluèrent vers le Mosquée de toutes parts pour savoir la
vérité.