La doctrine de l’autorité du savant – WILAYAT AL-FAQIH – est un principe
cher à l’Islam selon lequel l’autorité politique appartient aux ulémas, et en
premier parmi eux, le juriste religieux, le faqih. Ce principe est devenu depuis
la victoire de la révolution islamique sur le Chah, la clé de voûte de la
constitution de la République Islamique de 1979.
Parler de l’Imam al-Khomeiny et de la doctrine de l’autorité du savant – Wilayat
al-faqih – c’est chercher à établir le lien entre cette illustre personnalité et
la question théologique du Khalifat de l’homme. C’est aussi affirmer que l’Imam
al-Khomeiny est une des compétences qui ont exercé une influence considérable
dans l’application de cette doctrine.
Cependant, au regard des courants d’oppositions qui naissent en Iran, la
doctrine de l’autorité du savant ne peut être appliquée sans l’apparition de
l’Imam du temps – Al-Mahdi – (qu'Allah
hâte sa réapparition). Sa présence seule conditionne
l’opportunité de l’effectivité de cette doctrine. Ils vont plus loin dans leurs
allégations, en disant que l’Imam al-Khomeiny n’était pas le plus âgé de tous
les connaisseurs et non plus le plus savant de tous ses contemporains, d’où la
nécessité de l’exercice de cette autorité par l’Imam du temps – Al-Mahdi –
(qu'Allah hâte sa réapparition),
seul.
C’est ici que notre responsabilité en tant que théologien est engagée, dans le
sens d’établir toute la vérité sur cette affaire, en exposant la véritable
conception de l’Islam sur la doctrine de l’autorité du savant.
Ainsi, notre démarche suivra un développement en trois étapes. Dans un premier
temps, nous donnerons un aperçu historique de cette notion. Ensuite, nous
tenterons de répondre à ces allégations calomnieuses à l’endroit de l’Imam al-Khomeiny.
Et enfin, viendra la conclusion.
1. Aperçu historique.
Dieu, le Très-haut, a dit : «… (Rappelle) quant ton
Seigneur dit aux Anges : « Je vais placer sur la terre un Khalifat. »
« y placeras – Tu quelqu’un qui sèmera la corruption et
y répandra le sang alors que nous, nous glorifierons Ta louange et proclamons Ta
sainteté ? » et (Le Seigneur) « Je sais très
bien ce que vous ne savez point » Et (Le Seigneur)
apprit à Adam tous les noms… » (II.30).
C’est au groupe humain que le Khalifat a été octroyé et c’est Adam qui en son
temps fut le représentant. L’homme fut distingué par ce Khalifat, de toutes les
autres créatures de l’univers ; et c’est par la connaissance résultant de cette
responsabilité que l’homme a mérité la prosternation des anges et l’obéissance
de toutes les forces de l’univers visible et invisible. C’est sur base de cette
connaissance que l’homme doit gérer les affaires humaines et guider l’humanité
sur la voie tracée par le Très-Haut. Mais comment faire pour que l’homme puisse
cheminer aisément dans cette voie ?
Dieu, le Très-Haut, a alors institué la ligne du témoignage pour conduire
l’homme dans la pratique de son rôle de Khalife. L’institution de cette ligne
témoigne de la miséricorde divine envers ses créatures, car sans elle, la
création de l’homme serait absurde.
Dieu, le Très-Haut, a dit : « Nous avons, en vérité,
révélé la Tora où se trouvent une Direction et une lumière. D’après elle, et
pour ceux qui pratiquent le Judaïsme, les prophètes qui s’étaient soumis à Dieu,
les maîtres et les docteurs rendaient la justice, conformément au livre de Dieu
dont la garde leur était confiée et dont ils étaient les témoins. »
(V-44).
Ce verset hiérarchise la ligne du témoignage comme suit : En première position
les prophètes, ensuite les maîtres – les Imams – qui assurent la continuité de
la prophétie et, enfin, les « Docteurs » - les Ulémas – ils sont dans la
Marja’ya qui est un prolongement de la Prophétie et de l’Imamat.
C’est sur cette dernière née de la ligne du témoignage que nous allons parler
dans notre historique.
La doctrine de l’autorité du Savant qui est un principe de l’exercice du pouvoir
en Islam, en période d’occultation majeure – ghybat al-kubra -, trouve ses
racines dans les premières heures de ladite occultation, c’est-à-dire lorsque le
Douzième Imam – (qu'Allah hâte sa
réapparition) – s’est subtilisé du regard des êtres humains.
Dans les premiers temps de l’Islam, la présence du Saint Prophète puis des Imams
infaillibles était déjà suffisante, l’application de ce principe se limitait à
un réseau de consultation de juristes (Mujtahid) capable de répondre à la
plupart des besoins des gens localement en matière de dispositions légales, sans
qu’il faille se reporter essentiellement au prophète puis aux Imams infaillibles.
C’est seulement lors de l’occultation que ce principe trouvera son absolu
nécessité. Mais cela ne veut pas dire que le sujet n’était pas évoqué dans le
premier siècle de l’hégire. Puisque nous savons que les musulmans étaient
confrontés à la question du pouvoir et de l’organisation du Califat suite au
décès du Sain Prophète – (Que la Paix de
Dieu soit sur lui et sur sa famille) – bien avant l’occultation.
Ainsi, il y a eu quelques savants musulmans qui se sont intéressés, depuis le
1ier siècle de l’hégire jusqu’à nos jours, à la question de la théorie politique
en Islam de manière générale et à la question de l’autorité du savant en
particulier. Nous allons à chaque époque, citer quelques uns de ces savants :
1ier siècle : Ali Ibn Abi Rafi, Salman Farsi, Saud Ibn Musayyab, Urwat Ibn
Zubayr,
2ième siècle : Abi Nan Bizanti, Husseyn Ibn Saud ;
3ième siècle : Abdul Azim Hassani, Osman Ibn Saud,
4ième siècle : Muhammad Ibn Osman, Husseyn Ibn Rub, Ali Ibn Babuyeh, Ibn Abi
Aqil, Ibn Juney, Iskafi ;
5ième siècle : Siyyid Riza, Shaykh Mufid, Ibn Sina, Shaykh Tusi ;
6ième siècle :Ibn Zohre Husseyn, Ibn Idriss Hilli ;
7ième siècle : khajeh nasri tusi, muhaqqiq awwal ;
8ième siècle: allama hilli, hilal jazaeri, muhammad ibn hassan hilli, shahid
awwal;
9ième siècle : Fazal Miqdad, Ibn Fahd Hilli ;
10ième siècle : Muhaqqiq Thani ; Shahid Thani ; Maqaddas Ardibili ;
11ième siècle : Muhammad Amili, Muhammad Baqir Damad, Allama Majilisi, Agha
Hussayn Kansari ;
12ième siècle : Muhammad Baqir Majlisi, Fazel Hindi,
13ième siècle : Wali Bihbihani, Mahdi Bahr Alulum, Kashif Al Khata, Mullah Ahmad
Naraqi ; Shaykh Ansari ;
14ième siècle : Mirza Shirazi, Shaykh Fazlollah Nuri, Kazem Khurasani, Muhammad
Hussayn Nainii, Abdul Karim Haeri, Sayyid Hassan Mudarres, Abdul Qassem Kashani,
Agha Hussayn Burujerdi ;
15ième siècle : Rohollah al-Khomeiny, Muhammad Riza Golpaygani, Marashi Najafi,
Araki, Murtaza Mutahari, Muhammad Beheshti, Sayyid Khamenei, Muntanzeri.
De tous ces savants qui se sont intéressés à cette doctrine, nous allons dans le
cadre de notre réflexion parler de l’un d’entres eux, qui a institutionnalisé
cette doctrine, il s’agit de l’Imam al-Khomeiny.
2. L’exercice de la doctrine du savant.
Dans cette étape, nous chercherons à éclaircir la notion de la doctrine de du
savant afin de barrer la route à toute conception fallacieuse et erronée de la
dite doctrine.
Partant de Wilayay-al-faqih, dans son livre ‘’Le Dernier Message’’, l’Imam al-Khomeiny
a dit : ‘’selon les lois divines et les sources originales de l’Ecole des
hadiths crédibles, les plus conscients et les plus dignes de l’Ecole sont
chargés de poursuivre la mission historique du dernier Imam innocent, afin que
la ligne du Wialyat et la souveraineté des prophètes se poursuivent.
Ce sont des juristes sages et des savants de la nation qui sont les héritiers et
les hommes de confiance des Prophètes, et leur Etat est intitulé ‘’Welayat
Faqhih’’.[1]
Ce propos de l’Imam suffit largement pour répondre aux allégations mensongères
formulées en son endroit et autour de cette notion de l’autorité du savant. On
comprend bien que les auteurs de ces fausses informations et théories, ce sont
les adeptes de ceux qui ont balayé d’un revers de main la géothéologie,
géopolitique et géosociologie de la déclaration de Ghadir Khum. Ceux qui
militent pour le retour à l’antiquité politique de l’âge préhistorique à
l’impérialisme dynastique Omeyyade, Abbasside, Ottoman et du Chah d’Iran. Il est
donc du devoir de tout musulman de défendre l’Islam et ses valeurs sacrées
contre les disciples de ceux qui ont rempli les pages de l’histoire Islamique
d’affaires pénibles, en faisant de la Ummah un théâtre de conflits et une zone
de non droit pour clergé.
C’est ainsi que l’Imam al-Khomeiny n’a cessé de prévenir la Ummah du danger des
héritiers politique du Saqifat qui, bénéficiant du soutien des puissances
étrangères, cherchent à plonger la Ummah dans une confusion la plus totale.
Dans un message, l’Imam a dit : ‘’C’est le devoir de chaque musulman, en
particulier les Ulémas, les intellectuels et les universitaires, de défendre
l’Islam et ses valeurs sacrées qui garantissent l’indépendance et la liberté,
ainsi que défendre notre patrie menacée aujourd’hui d’un renversement… Puis il
fait allusion à l’histoire des luttes des Ulémas chiites au cours du siècle
passé et rejet le concept de « l’Islam sans clergé »’’.
Nous devons donc lutter pour une société clergicale où un Mojtahed remplissant
toutes les conditions requises serait le représentant de l’Imam durant son
absence. Celui-ci serait le gouvernant et l’autorité suprême de tous les
musulmans. Il serait appelé à accomplir ses fonctions en l’absence de l’Imam du
temps en ce qui concerne les décrets (les fatwas) et l’administration de la
justice. On ne doit pas attendre l’apparition de l’Imam du temps pour que la
doctrine de l’autorité du savant soit effective.
Le pouvoir du Faqih est l’expression du pouvoir
légal
La souveraineté juridique du Mojtahed remplissant les conditions requises,
lequel est considéré comme le prolongement de la mission de l’Imamat. Welayat
al-Faqih n’est pas une invention des époques modernes ses racines remontent
plutôt à la première époque de l’Islam et aux époques des Imams infaillibles.’’2
Le Prophète ((Que la Paix de Dieu soit sur lui et sur sa famille)), en son
temps, encourageait l’Ijtihad qui est un effort jurisprudentiel utile à la
conduite des affaires de l’Ummah. Le Prophète de Dieu (Que la Paix de Dieu soit
sur lui et sur sa famille) a dit à ce sujet : « Le juge (juriste) ne sait-il pas
qu’il est l’intermédiaire entre le tout Puissant et ses esclaves et c’est pour
cette raison qu’il se trouve entre le paradis et l’Enfer » (Bihar al-anwar, t.2,
p.120).
Le Saint Prophète (Que la Paix de Dieu soit sur lui et sur sa famille), qui est
le fondateur de la doctrine de l’autorité du savant, considérait les savants
comme ses successeurs. On rapporte de lui : « Mes successeurs sont ceux qui
après moi, rapportent les procès verbaux et ma Tradition » (Shaykh Saduq, Man la
yahzuruhu al-faqih, p.591). Le Prophète (Que la Paix de Dieu soit sur lui et sur
sa famille) en instituant la doctrine de l’autorité du savant a voulu par ce
geste anticiper sur le danger du vide politique qui risquerait de se créer au
moment de l’occultation du douzième imam.
Si l’Imam al-Khomeiny en son temps a pris la direction de la Ummah, en assurant
l’autorité suprême, c’est parce qu’il était un Mojtahid – les gens le suivent
dans tous les actes et commandements religieux et lui ne suit personne sauf le
Coran et la tradition prophétique -, le plus savant. Bien que dans son époque il
y avait d’autres grands savants, mais l’Imam al-Khomeiny a par son implication
dans les activités politiques et par sa contribution active à l’élaboration de
cette doctrine devancée les autres en popularité, en confiance et en crédit
auprès de la Ummah qui est censée choisir son Mojtahed. On comprend qu’en plus
de la connaissance, le pragmatisme politique est nécessaire à l’exercice du
pouvoir.
‘’Il est indispensable de comprendre que le pourquoi de la nécessité de la
Welayat al-Faqih à l’époque de l’occultation réside en ceci que le pouvoir du
Faqih signifie la présence de l’argument d’Allah devant les gens (le fait
d’indiquer aux gens la voie d’Allah), la direction temporelle de leurs intérêts
et l’administration de leurs affaires à la lumière de la loi islamique. L’un des
buts de ce Pouvoir est la sauvegarde des statuts légaux, car la mission de la
législation en Islam est le domaine réservé d’Allah.’’[2] L’Imam al-Khomeiny
était la personne idéale pour assurer le pouvoir du Faqih puisqu’il avait la
capacité intellectuelle, spirituelle ainsi que les compétences requises pour
être l’argument de l’Imam al-Mahdi (pl) auprès de l’Ummah.
Conclusion :
Pour clôturer notre sujet, nous citons cet hadith de l’Imam al-Mahdi (pl) qui
confirme la nécessité de la doctrine de l’autorité du Savant à l’époque de
l’occultation : « …Qu’ils cherchent parmi vous quelqu’un qui a rapporté nos
hadiths, qui a réfléchi sur ce que nous avions décrété licite et qui connaît nos
jugements, et qu’ils le choisissent comme juge. Car j’ai choisi comme juge entre
vous quelqu’un qui répondait à ces qualités. S’il juge conformément à nos vues
et que l’une des parties se moquait de son jugement, il se serait moqué du
jugement d’Allah… ».
Et, nous croyons que l’Imam (al-Khomeiny était choisi comme juge par l’Imam al-Mahdi
(pl) parmi tous les savants de son époque, puisqu’il répondait au profil type et
aux qualités évoqués par celui-ci (pl). la pensée de l’Imam al-Khomeiny
s’inspirait de deux grandes sources islamiques : Le Coran et la Tradition
prophétique.
Aujourd’hui, plus que jamais, la doctrine de l’autorité du Savant, avec la
dérive de l’idéologie capitaliste, parait être l’orientation politique la mieux
indiquée et la plus adaptée aux inspirations de la communauté musulmane. Face à
la crise morale et éthique crée dans le monde par l’idéologie laïque, la
doctrine de l’autorité du Savant est une panacée pour le développement de
l’humanité dans le Salam.
[1] Imam
al-Khomeiny, le Dernier Message, éd. ACIK, Téhéran, 1991, p.153.
2.Mohammad Redhâ al-Modhaffar, le chiisme tel quel, éd. Cité du savoir, Monréal,
2005, p.37.