Abdullâh Ibn Alî dit: «Alors que j'apportais des marchandises de Barah vers l'Egypte, j'ai rencontré sur la route un vieil homme dont les cheveux blancs accentuaient son aspect lumineux et saint et dont le visage reflétait la grandeur et la lumière de la foi. Il portait seulement deux vêtements, l'un noir, l'autre blanc.
J'ai demandé aux gens: "Qui est cet homme?"
On m'a répondu: "C'est Bilâl, le muezzin du Saint Prophète".
J'ai été très content d'apprendre ce fait, et j'ai décidé de bénéficier de son savoir. Je me suis procuré le matériel de l'écriture, et puis je me suis approché de Bilâl. Je l'ai salué et il a répondu à ma salutation.
Puis je lui ai demandé: "Qu'Allah te bénisse. Tu es l'un des Compagnons du Saint Prophète et tu as bénéficié de sa compagnie. J'aimerais que tu me relates les paroles que tu as pu entendre de lui.
- Bilâl me demanda: "Comment sais-tu qui je suis?"
- J'ai répondu: "Tu es Bilâl, le muezzin du Saint Prophète".
Lorsque j'ai prononcé ces mots, les larmes ont commencé à couler de ses yeux. Là mes larmes aussi se sont mises à couler, et tout le monde autour de nous a eu la même réaction.
- Bilâl m'a demandé: "D'où viens-tu?"
- J'ai répondu: "Je suis Irakien".
Il a paru content de savoir d'où j'étais, et après quelques secondes de réflexion, il a dit:
- O frère d'Irak! Ecris: Au Nom d'Allah, le Clément, le Miséricordieux. J'ai entendu le Saint Prophète d'Allah dire: "Ceux qui prononcent le Azan sont les fidéicommis de la prière et du jeûne des gens. Les aliments achetés dans un marché d'où s'élève la voix de l'Azan sont purs et licites, se battre contre des gens dans la ville desquels on entend la voix de l'Azan est illégal. Les muezzins ne demandent d'Allah rien qui ne leur soit assuré et n'intercèdent qu'en faveur de ceux pour qui l'intercession est acceptable".
Abdullah ajouta: «J'ai apprécié la parole de Bilâl et je lui ai dit:
- Qu'Allah te bénisse. Dis encore quelque chose.
Bilâl m'a dit:
- "Ecris", et s'est mis à relater:
- Quiconque récite l'Azan pendant quarante jours pour l'amour d'Allah, arrivera le Jour du Jugement avec un crédit positif de quarante bonnes actions parmi les siennes, déjà acceptées.
- J'ai dit: "Qu'Allah te bénisse! Relate encore d'autres paroles du Saint Prophète".
- Bilâl a poursuivi: «J'ai entendu le Saint Prophète de l'Islam dire:
"Si quelqu'un récite l'Azan pendant vingt mois, le Seigneur des mondes le ressuscitera le Jour du Jugement avec une lumière aussi répandue que le ciel".
"Si quelqu'un récite l'Azan pendant dix ans, Allah lui donnera la même place au Paradis que celle attribuée au Prophète Ibrâhîm (paix sur lui)".
- J'ai aussi entendu le Saint Prophète dire:
"Si une personne dit l'Azan, pendant un an, Allah le fera arriver le Jour du Jugement dans une condition telle que tous ses péchés auront été pardonnés, et ce même si ces péchés étaient aussi grands que le Mont d'Ohod.
"Le Saint Prophète a dit aussi: «Si une personne dit l'Azan en vue d'une prière pour l'amour d'Allah et pour s'approcher de Lui, Allah lui pardonnera tous ses péchés et le mettra en compagnie des martyrs dans le Paradis"».
Abdullah poursuit: «J'ai été piqué par la curiosité et j'avais de plus en plus soif d'entendre davantage les dires du Saint Prophète. Aussi ai-je demandé à Bilâl avec émotion et ferveur: «Louanges à toi. Relate-moi s'il te plaît les meilleures paroles que tu as entendues du Saint Prophète».
- Bilâl m'a dit: «O! Tu as touché les cordes sensibles de mon coeur», et il s'est mis à pleurer tellement que je ne pouvais plus retenir mes larmes.
Puis il a poursuivi: «J'ai entendu le Saint Prophète dire:
"Le Jour du Jugement, Allah rassemblera les gens et enverra les Anges qui porteront dans leurs mains des drapeaux de lumière qui seront montés sur des chevaux dont les rênes seront de "Chrysolite" et les selles de derrière en musc. Ils entreront le Jour du Jugement debout sur leurs chevaux et prononceront l'azan à haute voix (...) Je jure par Celui Qui m'a désigné pour la Mission Prophétique que lorsque la Résurrection aura lieu les muezzins monteront sur des chevaux de valeur et passeront devant les gens en disant: "Allâhu Akbar (Allah est Grand)". Lorsqu'ils auront prononcé ces mots, mes adeptes pleureront, et lorsqu'ils auront prononcé: "J'affirme qu'il n'y a d'autre divinité qu'Allah", mes adeptes diront: "Nous avons adoré Allah, l'Unique, dans le monde", et lorsqu'ils auront dit: "J'affirme que Mohammad est le Prophète d'Allah", mes adeptes diront: "Nous sommes les adeptes de ce Prophète que nous n'avons pas vu mais en qui nous avons cru". Puis, ils ajouteront: "Il est le même Prophète qui s'est acquitté pleinement de sa mission de Messager d'Allah (...)". Puis le Tout-Puissant Allah vous rassemblera vous, et les Prophètes, et ensuite, les muezzins iront à leurs places et il y aura des cadeaux qu'aucun oeil n'a vus et dont aucune oreille n'a entendu parler.»
Abdullah ajoute: «Puis, Bilâl m'a regardé et a dit: "N'abandonne pas l'Azan dans la mesure du possible et efforce-toi de ne pas mourir avant d'être muezzin".
Réciter l'azan et être muezzin, c'était un cadeau très enviable et très précieux offert à Bilâl. Grâce à ce cadeau inestimable, il était devenu notoirement connu, et tout le monde le regardait avec beaucoup de respect.
La personnalité de Bilâl et le respect dont il jouissait avaient rendu jaloux quelques individus. C'était notamment des gens qui avaient jadis du mépris pour lui, à cause de son statut d'esclave. Ils ne pouvaient donc pas supporter que des hommes issus de classes inférieures jouissent d'une telle position. Peu à peu ils songeaient à l'empêcher de dire l'Azan, et cherchaient le moyen adéquat d'exécuter leur mauvais dessein.
Pour atteindre ce but, ils élaborèrent et mirent à exécution plusieurs plans. Par exemple, un jour ils étaient venus voir le Prophète pour lui dire:
«La position de muezzin est une position trop haute pour être accordée à un ancien esclave. Il vaut mieux que le muezzin du Saint Prophète soit choisi parmi les personnalités notoires des Arabes».
Un autre jour ils lui suggérèrent: «La voix de Bilâl n'est pas adéquate du tout. Le muezzin doit avoir une belle voix pour mieux attirer les gens».
Ou encore: «Bilâl ne sait pas prononcer correctement les mots arabes, c'est-à-dire qu'il prononce le "ch", "s" (par exemple au lieu de Ach-hadu..., il dit As-hadu...) et c'est là un grand défaut qu'on ne peut ignorer».
Les détracteurs de Bilâl qui étaient très nombreux continuèrent à mener une campagne soutenue contre lui et échafaudèrent tellement d'arguments pour l'évincer, que le Saint Prophète commença à se demander s'il ne devait pas l'écarter de l'azan dans l'intérêt général.
A ce moment l'Archange Jibrâ'îl (Gabriel) descendit et informa le Messager d'Allah des complots des ennemis et le mit en garde contre leurs préjugés de l'époque obscurantiste (préislamique). Il confirma Bilâl dans son poste de muezzin en lui disant:
«Allah accepte le "s" de Bilâl comme "ch". Donc Bilâl ne pouvant pas prononcer le son "ch" correctement, le "s" qu'il prononçait à sa place a été accepté comme "ch"».
Ainsi, une réponse nette fut donnée aux dénigreurs de Bilâl, et ce dernier fut maintenu dans sa haute position.
Evidemment il y avait au sein de la communauté musulmane des ennemis de l'Islam, et des gens encore imprégnés des préjugés obscurantistes, mais Allah divulgua leurs plans abjects d'évincer Bilâl pour une question de prononciation qui cachait en fait leur racisme et leur esprit de classe. Plus tard, ces individus montreront leurs vrais visages et certains d'entre eux seront reconnus comme hypocrites avérés.