La lumière de
l’amour aux horizons de la vie
Les horizons de la vie humaine sont constamment éclairés par la flamme de
l’amitié.
Elle a une influence profonde et durable dans la marche de l’homme, au double
plan spirituel et matériel, et possède en cela un pouvoir immense et surprenant.
Cette force puissante est inhérente à l’âme et se développe jusqu’à devenir un
océan.
Si la clarté vivifiante de l’amour s’effaçait notre environnement, notre âme
serait cernée de toute part par l’obscurité, la solitude et le désespoir, et
l’on végéterait dans l’ennui et le dégoût de soi et du monde.
L’homme est de par sa création doté de l’instinct grégaire; vivre en communauté
lui est nécessaire.
Le déséquilibre psychologique, le fait fuir la société, rechercher la solitude
et détester la vie collective. Ceux qui s’isolent, et vivent en reclus pâtissent
en réalité d’un handicap psychique et existentiel, car il est évident que
l’homme coupé de la communauté, ne pourra jamais faire seul son bonheur. Tout
comme les nombreux besoins corporels l’obligent à s’activer, son esprit a aussi
des exigences qu’il faut combler, L’âme a soif d’amour, et les hommes
s’efforceront toujours de la satisfaire.
Nous sommes dans un besoin permanent et impérieux d’amour et de compréhension.
Depuis le jour où nous ouvrons les yeux sur ce monde, jusqu’à la dernière minute
où se referme le livre de notre existence, nous ne cessons de ressentir les
empreintes profondes de l’amour.
Quand il sent peser sur ses épaules les charges de la vie et que son âme
s’afflige par les évènements, et que les malheurs ont presque achevé de corroder
tous ses espoirs, l’homme laisse apparaître sur son visage la soif d’affection
et d’amour qu’il éprouve en son fond. C’est cette soif qui nourrit en lui la
flamme, qu’un jour meilleur naîtra des difficultés présentes, où la joie
succédera à l’affliction.
Sa conscience ne recherchera plus alors calme et silence qu’à l’ombre de l’amour,
et s’il est un baume pour les douleurs et les peines, ce ne peut être que
l’amour.
L’amour de l’homme envers son semblable est l’un des sentiments les plus nobles,
et nous pouvons même le considérer comme le fondement de toutes les vertus, et
la source de leurs effusions.
L’amour peut se communiquer, et la meilleure voie en est de se persuader qu’il
faut montrer généreusement notre affection envers nos congénères, ce qui est en
soi très profitable.
Si l’homme laissait se répandre les joyaux de son cœur, il en recevrait en
contrepartie le centuple.
Il ne tient qu'à chacun d’aimer et de se faire aimer. Et pour parvenir aux
trésors de l’affection nos cœurs doivent déborder de lumière et de sincérité.
Nous devons purifier nous pensées, et nous montrer accueillant envers tout le
monde.
Les sages ont dit:
La perfection de toute chose réside dans le degré de manifestation de ce qui
la caractérise essentiellement; et ce qui caractérise l’homme, c’est
l’attachement et l’amour.
Cette affinité spirituelle, cette attraction réciproque, ce penchant qui existe
entre les âmes, sont le socle sur lequel se fonde la solidarité, la coexistence
entre les gens.
Le docteur Alexis Carrel écrit dans son livre: «Réflexions sur la conduite de la
vie»:
«Pour que la société atteigne au bonheur, il faut que les individus qui la
composent se soutiennent les uns les autres à l’image des briques d’un édifice.
Mais rien ne peut les cimenter d’autre que l’affection que l’on observe parmi
les membres d’une famille: affection qui malheureusement ne s’étend pas à toute
la grande famille humaine.
L’amour a deux aspects: celui qui recommande d’aimer son prochain, et celui qui
recommande de se faire aimer de son prochain et de s’en rendre digne. Tant que
tout un chacun n’aura pas fait un effort pour renoncer aux mauvaises habitudes,
l’affection réciproque n’existera pas en acte. On peut parvenir à cet objectif,
en se refondant soi-même, et en se libérant des chaînes des défauts et des vices
qui nous séparent des autres.
C’est alors que les voisins se regarderont avec affection, que l’ouvrier et le
patron pourront avoir réciproquement un sentiment d’amitié.
Seuls l’amour et la tendresse peuvent instaurer dans la société humaine ce même
ordre que l’instinct entretient depuis des millions d’années dans la société des
fourmis et celle des abeilles ». 99
Rien d’autre que l’Amour ne sera notre Loi Rien de plus stable n’est gravé sur
la Table de l’existence. 100
L’orgueil
engendre l’inimitié profonde:
L’amour de soi fait partie des instincts fondamentaux de la nature humaine, et
est nécessaire à la poursuite de la vie. C’est de ce même instinct que procèdent
l’attachement de l’homme à ce monde, et sa lutte obstinée pour assurer sa survie.
Bien que cet instinct naturel soit une source d’énergie fructueuse, et permette
l’éclosion de nombreuses qualités louables, il n’en demeure pas moins que s’il
se développe de façon abusive et désordonnée, il donne lieu à la perversion
morale et à diverses déviations.
Le premier écueil aux vertus est la tendance trop prononcée à l’égocentrisme, au
point que nulle place n’est laissée à l’amour d’autrui. C’est cet amour excessif
de soi qui empêche la reconnaissance de ses fautes, et l’acceptation des
réalités incompatibles avec son égoïsme.
Le professeur Robinson dit:
«Il nous arrive de modifier spontanément nos opinions sans effort et sans
émotion. Mais, si l’on vient nous affirmer que nous sommes dans l’erreur, nous
nous révoltons contre cette accusation et prenons instantanément une attitude
défensive.
C’est avec une incroyable légèreté que nous formons nos convictions, mais il
suffit qu’on menace de nous les arracher pour que nous nous prenions pour elles
d’une passion farouche. Evidemment, ce ne sont pas tant nos idées que notre
amour-propre que nous craignons de voir en danger....
Nous nous insurgeons non seulement quand on nous dit que notre montre retarde,
que notre voiture est démodée, mais aussi quand on insinue que notre conception
des canaux de Mars, de la valeur médicinale du salicylate ou de la civilisation
des Pharaons est erronée.... Il nous plaît de continuer à vivre dans les
croyances que nous avons été accoutumés à considérer comme vraies ». 101
L’orgueil, le plus grand ennemi des hommes ravage leurs bonheurs. De tous les
vices moraux aucun n’est aussi répugnant; il rompt les liens de l’affection et
de l’entente, les remplace par l’inimitié, et attire la réprobation générale.
Tout comme on attend des autres qu’ils nous marquent de l’estime et de la
considération, il faut préserver leur honneur, s’abstenir de tout ce qui serait
contraire aux règles de la bonne fréquentation, et nuirait à la concorde.
Le mépris des sentiments des gens suscite forcément une réaction, entraînant
pour son auteur humiliation et discrédit.
Chacun jouit selon son mérite et son rang du respect et de la bienveillance
profonde des gens. Mais celui qui est prisonnier de son égoïsme, et dont la vie
entière est régie par l’amour de soi, ne prend en considération que les désirs
de sa personne, ne s’inquiétant jamais de l’état de son prochain. Il s’acharne à
se donner des airs de célébrité et de grandeur, et à faire reconnaître sa
supériorité illusoire.
Son obstination à vouloir mériter le respect des gens, hors de toute logique,
fait naître une contradiction flagrante entre ce qu’il désire et la haine et la
répulsion profondes que lui voue son entourage.
Cette réaction de la société envers l’orgueilleux lui est accablante, et il ne
la supportera qu’avec peine et amertume.
L’infatuation s’accompagne toujours de pessimisme. La flamme de la
susceptibilité brûle dans le cœur de l’égoïste, et lui fait voir tout le monde
comme des ennemis.
L’indifférence des autres à son égard et les coups que son orgueil en reçoit
continuellement ne s’effacent jamais de sa mémoire, et qu’il le veuille ou pas,
agissent particulièrement sur son esprit. Et chaque fois que l’occasion lui est
donnée, il laisse se déchaîner son ressentiment et sa vengeance contre la
société, et il n’aura de cesse que lorsque son bouillonnement intérieur se sera
assagi.
Quand le démon de l’orgueil et de l’égotisme s’insinue en l’homme, il fait
naître en lui un «sentiment d’infériorité», qui se développe graduellement en «complexe
d’infériorité» pénible et destructeur, pouvant donner lieu à différents crimes,
et conduire l’orgueilleux à des actes d’injustice de plus en plus graves.
De l'étude de l’histoire universelle, il se dégage clairement ce fait que ce
sont les arrogants et les fats qui se sont toujours dressés contre les prophètes
divins, et ont refusé d’admettre la vérité et le droit.
Les exterminations collectives, et les barbaries qui ont accompagné les guerres
mondiales, et ont failli entraîner le genre humain au bord de l’anéantissement
ont eu leur cause dans l’orgueil et l’amour démesuré de soi qui animaient
certains groupes de personnes parvenues aux rênes du pouvoir.
La plupart des individus ayant grandi dans les familles déchues, et parvenu à un
poste quelconque de l’échelle sociale, se réfugient le plus souvent dans la
vanité et cherchent par cette voie à compenser l’infériorité de leur extraction.
Ils s’imaginent avoir une personnalité supérieure à celle des autres, et tentent
par une attitude orgueilleuse à faire accréditer cette supériorité illusoire.
Chacun peut constater autour de lui ce type de caractère. Un homme réellement
éminent et de valeur n’éprouve jamais le besoin de se grandir aux yeux des gens,
de se donner des airs de supériorité ou de leur montrer du mépris. Il sait
pertinemment que l’orgueil ne confère nulle grandeur authentique, que l’égoïsme
et la fierté ne donnent pas du mérite, et qu’ils n’ont porté personne au pinacle.
Un psychologue recommande:
«Fixez des limites à vos espoirs et désirs, baissez le niveau de vos attentes,
libérez-vous des passions et des instincts, éloignez-vous de l’orgueil et de la
vanité, et brisez les liens de l’illusion; vous vous assurerez alors une santé
plus forte et plus durable.»
Les Saints,
modèles de modestie
La modestie est la vertu clef pour se faire aimer. Le modeste, se conformant à
la morale, élève sa valeur dans la société jusqu'à un degré honorable,
accroissant ainsi le rayonnement de sa personnalité dans les cœurs.
Naturellement, il ne faut pas confondre la modestie et l’avilissement, chacune
des deux qualités devant être traitée à part. La première est une vertu morale
procédant de l’honneur et de la magnanimité de la personne ainsi que de la
tranquillité de sa conscience, alors que la seconde naît de la décadence morale,
et traduit l’absence de personnalité.
Loqman le sage mettait en garde son fils contre l’orgueil, en ces termes que
rapporte le Coran:
« Et ne renfrogne pas ta joue, pour les gens, et ne
foule pas la terre avec arrogance; Dieu n’aime pas du tout, vraiment, le
présomptueux plein de gloriole...» 102
Dans une autre sourate, le Coran dit:
« Et ne foule pas la terre avec orgueil; non, tu ne
sauras jamais déchirer la terre et tu ne pourras jamais être haut comme la
montagne! »103
Ali, l'Emir des Croyants dit dans le sermon appelé: «Al-Qasiah»:
« Certainement si Dieu devait permettre à quelqu’un qu’il fut fier, Il
l’aurait permis à Ses Prophètes et Amis favorisés. Mais Dieu –qu’Il soit exalté-
a fait détester la vanité aux saints et leur a agréé l’humilité.
Ils ont alors posé leurs joues sur la terre, mêlé leurs visages dans la
poussière, ont montré de la compassion envers les Croyants, et sont demeurés des
gens modestes...» 104
Avant lui le Prophète de l’Islam -que la paix soit sur lui et sur sa Famille-
disait:
« Evitez l’orgueil! Car quand l’homme se montre longtemps arrogant, Dieu
ordonnera qu’on l’inscrive parmi les despotes ».
L’Imam as-Sadeq a formulé de façon concise l’origine psychologique de l’orgueil:
« Nul ne se montre orgueilleux, à moins d’éprouver en lui-même un sentiment
d’humiliation ». 105
Le Dr. Bride dit:
« Pour une personne ou pour un peuple, la recherche de la supériorité ne
signifie rien d’autre que mépris et méchanceté envers leurs semblables.
La plupart des inimitiés et des querelles de nos jours, résultent du complexe
d'infériorité. En réalité au fond de pareils comportements se trouvent une sorte
de fausse compensation du sentiment de faiblesse.
Autrement aucun homme pur et honorable ne verrait un privilège ou une différence
entre lui-même et les autres ». 106
Les arrogants et les vaniteux sont satisfaits de leurs actes et paroles. Ils
considèrent même leurs insuffisances comme des qualités éminentes.
A ce propos, l’Imam Moussa Ibn Jaafar -que la paix soit sur lui- a dit:
« L’orgueil a plusieurs degrés, notamment celui où il enjolive à l’homme ses
mauvaises actions, les lui fait voir justes, les lui fait aimer, et lui fait
croire qu’il fait œuvre belle ». 107
Un psychologue écrit pour sa part:
« L’orgueilleux prend ses défauts pour des qualités, ses insuffisances pour
des avantages. Ses accès de colère contre ses subordonnées sont à ses yeux une
preuve de l’excellence de sa personnalité; sa faiblesse et sa maigreur lui
deviennent une preuve de sa sensibilité extrême, elle-même résultant de son
élévation spirituelle. Les gros sont rigolos et indélicats.
En revanche, s’il est gros, c’est alors un signe de bonne santé. Et comme un
esprit sain est dans un corps sain, on ne peut jamais compter sur les maigres.
Ils s’énervent vite et l’on ne peut jamais prévoir leurs réactions... et ainsi
de suite...»108
Voyons à présent quelques paroles
du Patron des pieux, Ali Ibn Abi Talib -que la paix soit sur lui-:
« Gardez-vous de la fatuité; elle accroît l’inimitié envers vous ».109
De nos jours les savants sont d’avis que l’arrogance est une forme d’idiotie et
de démence. Ce qui se rapproche des paroles du premier Imam, prononcées en
différentes occasions:
« L’orgueil corrompt l’intelligence ». 110
« L’homme faible d’esprit est fort en prétentions ». 111
« La modestie est le summum de l’intelligence, et l’orgueil le comble de
l’ignorance ». 112
« L’orgueil est un mal profond ». 113
« L’homme qui tire vanité de son état, se prive des moyens de s’amender
». 114
Le Dr. Helen Shakhter dit:
« Un moyen pour s’attirer l’attention des gens -quand notre échec est total-
consiste à s’innocenter, à se glorifier sans retenue; puis prenant ses désirs
pour la réalité, à s’imaginer comme accomplies toutes les tâches dont on a
rêvées. Ou encore pour compenser les revers subis, épilogué sur les actions que
nous avons pu mener à terme, en les grandissant aux yeux de nos interlocuteurs,
fussent-elles petites et méprisables. Ces gens- là séduits par leurs belles
fanfaronnades, se contentent de mentir laissant s’échapper ainsi toutes les
chances de se réformer ».115
L’égoïste ne se rend pas compte qu’il est imparfait, pour voir combien les
autres sont mieux accomplis et en quoi ils lui sont supérieurs.
A ce sujet, citons encore une parole de l’Imam Ali:
« L’homme satisfait de lui-même se rend aveugle à ses défauts. S’il
reconnaissait les qualités et l’excellence d’autrui, il apprendrait ses
imperfections et tout ce qu’il a manqué ».116
L’Islam qui veut promouvoir une culture humaniste supérieure, et créer les
conditions d’une vie plus riche, a abrogé tout privilège injuste, et ne
reconnaît que le privilège de la foi et de la piété.
« Hommes!, Nous vous avons créés d’un mâle et d’une
femelle et Nous vous avons constitués en confédérations et en tribus, pour que
vous vous connaissiez. Le plus noble d’entre vous aux yeux de Dieu, est le plus
pieux ». 117
A propos de ceux qui se vantent de leur richesse, l’Imam Ali a dit:
« Cherchez refuge auprès de Dieu, de l’ivresse que confère la richesse. Car
il est très difficile de reprendre conscience après cette ivresse ». 118
Un homme riche vint un jour auprès du Prophète -que Dieu lui accorde ainsi qu'à
sa Famille, bénédictions et Salut-. Quelque temps après, un pauvre arriva et
prit place à côté du riche. Voyant cela, celui-ci tira vers lui les pans de sa
robe, et s’écarta du pauvre. Le Prophète qui observa cette scène lui dit:
« Crains-tu que sa pauvreté ne te touche? » L’homme répondit: «Non».
- Crains-tu que tes vêtements soient souillés?
- Non.
- Pourquoi alors as-tu tiré les pans de tes vêtements, et as-tu changé de
position?
- Ô Prophète de Dieu, ma richesse m'a empêché de comprendre les vérités, et me
fait voir comme bons tout ce qui est mauvais et laid. En expiation de ce mauvais
comportement, je donne la moitié de ma fortune à ce pauvre homme.
Le noble Prophète demanda au pauvre:
- Acceptes-tu ce don?
Il répondit: «Non».
Le riche lui demanda la raison de ce refus. Le pauvre répondit:
- Je crains qu’à mon tour, je sois atteint par un défaut si rebutant.»
Par conséquent, si l’égoïste veut atteindre au bonheur, il devra sérieusement se
réformer, et chasser hors de lui ce défaut qui porte gravement préjudice à sa
personnalité.
S’il ne se s’attèle pas à cette tâche, il devra se résigner à vivre toute sa vie
dans le dépit et la frustration.