3. L'environnement a été créé pour
permettre la vie
Nous devons donc, dans les rapports que nous entretenons avec ce milieu nous
convaincre que celui-ci dispose d'un patrimoine naturel déterminé. En effet,
tout changement structurel dans les éléments de notre système n'est pas sans
perturber leurs fonctions essentielles et leurs relations interdépendantes.
Cette rupture en outre crée un déséquilibre écologique où, de facteurs utiles,
ces éléments se transforment en facteurs nuisibles entraînant des dangers qui
menacent la vie dans son évolution.
Ainsi, si les populations d’une espèce dépassaient la capacité de leur
environnement, cela s'accompagnerait d'une pression sur la nature et ses
ressources de sorte qu'il y aurait un impact et sur le milieu naturel et sur les
espèces qui y évoluent. Il se peut aussi que, sous l'impulsion de nouvelles
conditions naturelles accompagnées d'obstacles crées par la vie et son évolution,
cette vie ne soit perturbée dans sa continuité et son développement naturel.
Nous en avons un exemple dans l'état où se trouvent actuellement l'homme et les
espèces animales dans certaines régions du monde. Ainsi, les prairies (pacages) au nord
de l'Iraq supportaient jusqu'à 250.000 têtes de bétail sans que cela n'agisse
sur l'écosystème biologique. Mais, on a remarqué dernièrement que le nombre de
bêtes du bétail dépassait le million ; ce qui signifie que la capacité de ces
pacages devrait supporter 3 fois plus qu’avant, ce qui ne manquera pas de créer
un déséquilibre dans la région. Nous avons un autre exemple au Maghreb arabe où
les populations humaines ont doublé et parfois même quadruplé depuis le début du
siècle et où le taux de croissance démographique a atteint en 1997 1,9%. Sachant
que 60 à 80% des habitants de cette région vivent de l'élevage et de
l'agriculture, on ne peut que se rendre à l'évidence que la capacité naturelle
de ces régions ne peut supporter un tel entassement de populations vivant pour
une grande majorité de la nature.
Dans l'émirat de Oman, les richesses animalières se sont tellement accrues dans
la région de Dhofar, que les responsables politiques n'ont pas hésité à mettre
en garde les éleveurs pour que ceux-ci préservent la capacité des pacages à
supporter un seuil raisonnable de têtes de bétail. Par ailleurs, dans les deux
communes de Darfour et Kardafar au Soudan, les populations ont été multipliées
par 6 de 1918 à 1988 et leur bétail a connu un accroissement considérable (21
fois plus pour les bovins, 16 fois plus pour les dromadaires, 12 fois plus pour
les ovins et 7 fois plus pour les caprins), ce qui s'est accompagné bien sûr par
un recrudescence des aires de pâturage envahies de surcroît par la culture du
tabac. Tous ces exemples, montrent que l’homme fait supporter au milieu naturel
plus que ses capacités.
- Cela étant, l'Islam a toujours appelé à la préservation des éléments du
système naturel dans leur état par une mise en valeur raisonnée de ce milieu
afin que ses systèmes continuent à jouer le rôle qui leur est dévolu dans la
préservation de la vie d'une manière continue. Dieu dit à cet égard : "Quiconque
change le bienfait de Dieu après qu'il lui a été attribué (sera) puni, car Dieu
est redoutable en Son châtiment ". (La Génisse, v :
211)
4. L'environnement au service de l'homme, vicaire de Dieu
sur la terre
Dieu dit : " N'avez-vous pas vu que Dieu a soumis pour
vous ce qui est dans les cieux et (sur) la terre et qu'il a répandu sur vous Ses
bienfaits manifestés ou cachés " (Luqman, v : 20)
; puis Il dit en plaçant l'homme en tant que vicaire sur terre : «
C'est Lui qui a fait de vous les détenteurs de la terre
». (Les Troupeaux, v : 165)
Dieu a certes honoré l'homme en mettant à sa disposition les nombreuses
richesses de la terre et l'a élevé au dessus de toutes les autres créatures. Il
dit à ce propos : " Nous avons certes honoré les fils
d'Adam. Nous les avons portés sur la terre ferme et la mer. Nous leur avons
attribué des (nourritures) excellentes et Nous les avons placés bien au dessus
de beaucoup de ceux que Nous avons créés."
(Le Voyage Nocturne v : 70)
Le vicariat de l'homme signifie que la terre se trouve seulement sous sa tutelle,
et qu’elle n'est point sa propriété. L'environnement lui a été en quelque sorte
remis en location pour qu'il le gère et le mette en valeur le temps que durera
son passage sur la terre, comme lorsque Dieu dit : «
Vous aurez, sur terre, séjour et (brève) jouissance jusqu'à un moment (fixé)
». (La Génisse v : 36)
Ce vicariat nécessite que l'homme soit fidèle au dépôt qui lui a été remis,
d’autant plus que notre environnement représente l'héritage de l’humanité entière et une richesse que se
lèguent des générations entre elles.
Par conséquent cette terre n'est pas notre propriété exclusive, elle nous a été
remise par les générations qui nous ont précédés pour que nous la léguions saine,
et ne comportant aucune détérioration, aux générations qui viendront après nous.
5. La
préservation des éléments du système naturel est un devoir strict et un devoir
de suffisance communautaire (Fardu Kifaya)
Tout ce que nous avons exposé plus haut montre que la sauvegarde de la nature et
la préservation de ses richesses, que nous ne sommes pas en droit d'exploiter
excessivement ni de gaspiller, constitue une obligation religieuse stricte et un
devoir religieux de suffisance communautaire. Dieu en effet réserve Son
châtiment ici-bas et dans l’au-delà à ceux qui détériorent Ses bienfaits sur
terre. Il est d'ailleurs évident que les problèmes écologiques consécutifs à la
dévastation de la nature et que vit l'humanité aujourd'hui, constituent une
partie de ce châtiment que Dieu réserve à ceux qui ont détérioré
Ses bienfaits. Ne dit-Il pas d'ailleurs dans Son Coran : "
Le dégât est apparu sur terre et dans la mer par ce qu'ont acquis les hommes
de leur propre main, pour leur donner un avant goût de ce qu'ils ont accompli.
Peut-être reviendront-ils ? ". (Les Romains v : 41)
6. La
préservation de l'environnement est un culte
Dieu a créé l'homme et l'a chargé d'une fonction dans la vie terrestre lorsqu'Il
dit dans son Coran : " Je n'ai créé les démons et les
hommes que pour qu'ils M'adorent ". (Les Vents v : 56).
Dans son sens global, l'adoration ne s'arrête pas au fait de s'acquitter des
actes culturels comme la prière, le jeûne, le pèlerinage et autres, mais englobe
le fait de se conformer sincèrement aux prescriptions de l'Islam et de suivre
ses orientations dans tous les domaines de la vie. Ainsi, exploiter sainement
les ressources de la terre, tout en les préservant pour qu'elles parviennent
saines aux générations futures afin qu'en bénéficie l'humanité entière est une
adoration. Ne pas polluer la nature et la sauvegarder par une exploitation
pondérée est une adoration. Ne pas polluer le sol et l'air est une adoration,
exploiter sainement les biens communs est une adoration, Eviter la chasse et le
pâturage excessifs est une adoration.
C'est qu'effectivement, toute relation constructive de l'homme avec les
composantes de l'environnement naturel et civilisationnel à partir de
comportements islamiques sains, constitue une prescription divine à laquelle
nous sommes dans l’obligation de nous plier tout en étant reconnaissants au Très
Haut pour les nombreux bienfaits qu'Il nous prodigue, car Il dit à l’homme :
"...Sois bon comme Dieu le fut envers toi ! Ne
recherche pas la Dégradation sur la terre ! Dieu n'aime pas les déprédateurs
". (Le Récit v : 77)
Dieu a été généreux envers nous en mettant à notre disposition cet environnement
qui comporte les composantes de la vie. Nous ne devons donc pas rendre le bien
par le mal en gaspillant les ressources naturelles par un comportement qui les
dégrade et les menaces de disparition. Un tel agissement nous fait oublier le
sens réel de l'adoration de Dieu et nous en écarte, car il comporte un danger
pour toute l'humanité alors que l'Islam nous interdit de porter atteinte à
autrui et à nous-mêmes.
Le Prophète (Que la Paix de Dieu soit sur lui et sur sa famille) dit à ce propos : "
Nul ne doit nuire à l'autre ".
L'Islam considère l'exploitation excessive des ressources naturelles provoquant
leur épuisement et leur pollution en l'absence d'une mise en oeuvre raisonnée et
pondérée pour leur préservation comme un reniement des bienfaits de Dieu et une
ingratitude envers Lui; Dieu narrant l'histoire des cités ayant rejeté Ses
bienfaits dit:
" Celui-ci en punition de ce que les gens de cette cité ont accompli, leur a fait
goûter la faim et la peur ". (Les Abeilles, v : 112)